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TRAITE DES OPINIONS PHILOSOPHIQUES

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PREFACE LIVRE PREMIER  LIVRE SECOND LIVRE TROISIEME LIVRE QUATRIEME LIVRE CINQUIEME NOTES

Ce traité est peu connu, c'est cependant une mine de renseignements sur les opinions des anciens, pratique : elle est classée par genre.

Bien entendu, elle est limitée par ce qu'en connaissait l'auteur, mais c'est un document important. Merci à Eric DUBREUCQ qui l'a mis à la disposition de tous. Son texte est ci-dessous en italique, le "Traité " est tel quel, y compris la présentation.

C.G. le 6 mai 1997

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RETOUR à COSMOS  RETOUR à VIOLA TRICOLORNOTES
***************

Préface



La présente édition du traité _Des Opinions des philosophes_

appelle, en guise de Préface, un certain nombre de remarques, et

sur le fond, et sur la forme. Pourquoi se soucier, tout d'abord,

de publier ce texte, puisqu'il existe des traductions complètes

des &brvbar;uvres de Plutarque en langue moderne? La L&brvbar;b Classical

Library, d'une part, donne une édition avec traduction anglaise

des _Moralia _ (en 17 volumes) et des _Parallel Lives _(en 11

volumes); aux éditions des Belles-Lettres, dans la collection des

Universités de France, d'autre part, sont publiées et traduites

les _Vies parallèles,_ et cours de publication les _æuvres

morales._ On peut encore ajouter qu'une traduction des _Vies

parallèles,_ celle de J. Amyot, est également publiée aux éditions

Gallimard, dans la collection de la Pléiade.
 
 

On chercherait cependant en vain le titre que nous présentons dans

tous ces volumes, et ceci pour la raison après tout défendable

qu'il s'agit d'un écrit apocryphe. Le véritable auteur des

Opinions des Philosophes n'est pas Plutarque de Chéronné - qu'il

convient de bien distinguer de Plutarque d'Athènes: ce dernier fut

l'un des scolarques de l'école néoplatonicienne d'Athènes, et l'un

des maîtres de Proclus. Plutarque de Chéronnée est un historien

et philosophe grec qui vécut à la fin du Ier siècle et au début du

IInd siècle après Jésus-Christ. Et, s'il est l'auteur des _Vies

parallèles_ et des _æuvres philosophiques et morales_, traduites

par J. Amyot au XVIème siècle, il n'est pas l'auteur de ce recueil

d'_Opinions_ (ou _placita_ en latin, ou ???? (stromates) en grec,

qui signifie bigarrure, chose composite - nous dirions: un

patch-work, ce qui rend assez bien l'impression que dégage cet

écrit). Du véritable auteur, nous ne savons rien, et devons nous

résigner à l'appeler le Pseudo-Plutarque (ou encore: [Plutarque],

en adoptent les conventions modernes). Tout ce que nous savons,

c'est que ces Stromates sont composée en suivant un modèle: celui

du doxographe, ou collecteur d'opinions des philosophes anciens,

Aétius. De cet auteur, à nouveau, on ne sait rien... Mais le

philologue allemand Diels a démontré, dans son ouvrage _Doxographi

Græci,_ Berlin, 1879, que les _Placita _d'Aétius étaient la plus

ancienne version de ce type de recueil, que l'on pourrait appeler

d'un titre générique: _Recueil d'opinions des philosophes._
 
 

Qu'on nous pardonne de nous attarder sur ces détails qu'aucuns

jugerons gratuitement érudits, mais la chose est indispensable si

l'on veut comprendre exactement de quoi il s'agit. Le

Pseudo-Plutarque recopie Aétius, lequel recopie un Recueil dont

l'archétype renvoie à la plus haute antiquité: la lecture du

traité que nous republions ici donne donc accès, de façon certes

indirectes, mais la seule encore possible, à certains systèmes de

pensées de la plus haute Antiquité. Aristote lui-même, au premier

livre de sa _Métaphysique, _ est l'auteur d'un semblable recueil,

lorsqu'il expose les opinions ou thèses des philosophes qui l'ont

précédés sur la question du nombre et de la nature des causes et

principes qui président à toutes réalités. Dans une question

difficile, Aristote conseille en effet de prendre soin, au

préalable, d'exposer la doctrine des penseurs qui en ont déjà

traité - présentation qu'il appelle dialectique -, avant que de la

critiquer, de sorte à approcher plus aisément de la vérité. Dans

cette perspective à la fois historique, critique et heuristique,

il devient essentiel de constituer semblables recueils à celui qui

nous occupe ici. Aristote fut le premier à ouvrir la voie à ce

style. Même s'il arrive à Platon (par exemple dans le _Sophiste)_

de donner un expression des philosophes qui l'on précédés, il

n'est en effet pas certain qu'il soit très fidèle à leurs écrits.

Lisons un peu ce qu'explique mon bon maître Jean-Paul Dumont,

traducteurs des _Présocratiques _dans la Pléiade:
 
 

" Théophraste, le successeur immédiat d'Aristote, dont il était

l'élève, à la tête du Lycée1, a mis systématiquement en pratique

l'impératif dialectique lié à la pédagogie de son maître, et fait

établir à cet usage des recueil ou collections d'opinions - plus

tard désignés du nom latin de Placita. La première édition en fut

très tôt perdue. Mais l'histoire de ses copies successives a

constitué le premier travail de Hermann Diels - le ressembleur des

textes présocratiques que nous lisons ici - aboutissant à son

édition grecque des _Doxographi græci,_ à Berlin, en 1879. Il y

établir que le plus ancien recueil théophrastien d'opinions - les

_Vetusta placita_ - a été recopié ou réédité par un certain

Aétius, savant de date inconnue et dont l'ouvrage est lui aussi

perdu, mais a par chance été recopié par deux auteurs dont l'un,

le pseudo-Plutarque, est inconnu, et l'autre est Jean Stobée, qui

a édité le _Choix _de textes au Ve siècle de notre ère. Diels en

offrait une édition synoptique sur deux colonnes. Ainsi est née,

avec Aétius, la doxographie scolaire: elle consiste en des

recueils de philosophie par les textes ou en ce que les éditeurs

d'Outre- Manche appellent des _Source books,_ destinés à alimenter

la réflexion des jeunes gens étudiant la philosophie2. "
 
 

On voit par là que le texte du Pseudo-Plutarque, tel qu'il est

traduit dans la langue savoureuse du XVIe siècle par J. Amyot,

présente un quadruple intérêt (en attendant une traduction précise

des _Doxographi græci _ de Diels). Tout d'abord, parce que, de

Théophraste à Aétius, et d'Aétius à Stobée et au Pseudo-

Plutarque, il permet de remonter à une époque quasi- contemporaine

d'Aristote. Ensuite, parce que de cette époque et de celles qui

suivent, bien des ouvrages ont disparu: ainsi le Stoïcisme ancien,

puisque les &brvbar;uvres de Zénon de Cittium, de Chrysippe et Cléante

sont entièrement, ou peu s'en faut, perdues, la doctrine

d'Epicure, dont trois lettres seulement nous ont été conservées

par Diogène Laërce, ou encore des Présocratiques dans toutes leur

diversité, et de bien d'autres, ne nous sont au fond accessibles

que par des témoignages, au rang desquels le traité _Des Opinions

des philosophes _ vient naturellement prendre une place

privilégiée. Pourquoi en donner la version de J. Amyot? Non pas

seulement pour le plaisir de la langue de ce siècle. Mais parce

qu'elle se situe à l'aurore d'une révolution qu'on a coutume de

nommer la copernicienne ou la galiléenne. Sans doute faudrait-il

se plonger profondément dans l'histoire de la Renaissance pour

prouver les affirmations suivantes, mais la place et le temps

manque malheureusement ici: les savants de la Renaissance furent

très tôt à la recherche de modèles scientifiques permettant

d'échapper à l'emprise de l'aristotélisme; or, de ce point de vue,

l'atomisme épicurien et le matérialisme stoïcien s'offraient à eux

naturellement. Et cela est une troisième raison de privilégier la

traduction de J. Amyot. Pour ne prendre qu'un exemple, on parle

souvent des éléments stoïciens à l'&brvbar;uvre dans les traités de

Descartes (par exemple dans les _Principes de la philosophie

naturelle,_ ou dans le _Traité des Passions de l'Ame)_, ou de

l'atomisme de Gassendi: une comparaison précise des thèses

exprimées par ces savants (ainsi, généralement, que par ceux des

XVIè, XVIIè et XVIIè siècle) pourrait peut-être permettre de mieux

mesurer leurs sources, leur degré d'originalité vis-à-vis de ces

sources et, par là, la ce qui relève chez eux de l'invention

conceptuelle à proprement parler.
 
 

Il reste un quatrième type de raisons à mettre en avant: et qui

est celui, purement et simplement, de ne pas laisser perdre les

textes, mais au contraire de les rendre accessibles directement à

l'honnête homme du XXè siècle, lequel, qui plus est, aux commandes

de son ordinateur, dispose désormais d'un outil d'exploitation

matériellement supérieur aux instruments de papier des érudits de

la Renaissance.
 
 

Le Traité des _Opinions des Philosophes_ est composé de cinq

livres. Il est visible, à la lecture des gloses que J. Amyot a

cru bon d'ajouter au texte, qu'il a certainement cru y lire

quelque chose qui ressemblait à une _somme._ Non pas seulement du

modèle de celle que saint Thomas d'Aquin nous a laissé sous le

titre de _Somme Théologique,_ mais encore de celle que Descartes

rêvait d'écrire, lorsqu'il parle, dans une lettre à Huygens du 29

Juillet 1641, de sa "Physique, ou plutôt le sommaire de toute la

Philosophie", et qu'il prubliera sous le titre des _Principes de

la philosophie._ Il ne faut jamais oublier, si l'on veut

comprendre à quoi l'on a affaire, que c'est de la notion de somme

ou de sommaire que l'arbre de toute la philosophie (cf.

Lettre-Préface, AT IX-2, 26, rééd. Vrin, p. 14, li.23 & sv.),

dont les racines sont la Métaphysique, le tronc la Philosophie

naturelle (= la Physique) et les trois branches, respectivement,

la Mécanique, la Médecine et la Morale, est une illustration de

cette notion de somme, laquelle est "un corps de Philosophie tout

entier" (idem, AT IX-2, 30 = Vrin 17,9), c'est-à-dire tout

simplement de l'ensemble des savoirs existants.
 
 

C'est à quelque chose de comparable, ou tout au moins de semblable

aux recueils de _Question naturelles,_ de Pline, de Sénèque, ou

d'autres, dans lesquels on puisait alors bien des doctrines

scientifiques, que J. Amyot a certainement cru avoir affaire.
 
 

L'objet général du traité du Pseudo-Plutarque, c'est la nature,

par opposition à la philosophie morale et à la philosophie verbale

(I, préf.): entendons par-là qu'il ne s'agit ni d'éthique, ni de

logique, mais de la science qui chercher les principes de tout ce

qui existe par nature (et non du fait de l'action, ou du

raisonnement humain). C'est en ce sens que cette collection

d'opinions traite d'abord des principes incorporels et éternels

(I) puis des principes célestes ou supra-lunaires, c'est-à-dire

corporels et éternels (II) avant de passer aux réalités

sublunaires (III à IV), elles-mêmes soigneusment classées: celles

qui sont au- dessus de la terre et au-dessous du ciel et de la

Lune, les Météores (III); celles qui sont terrestres et touchent à

l'âme (IV); et, enfin, celles qui sont terrestres et corporelles,

tuchant à la vie (V).
 
 

Le Premier Livre, en effet, pour objet les principes et les

réalités métaphysiques - ou plus exactement tout ce qui se range

des principes, éléments et causes (I, chap.II, jusqu'à la

nécessité, la destinée et la fortune (I, chap.XXIX). On passe

alors, avec le deuxième livre à l'examen des réalités corporelles:

du monde (II, chap.I) à la Lune et au calendrier (II, chap.XXXI &

XXXII). Sous la Lune, il faut alors ranger les réalités

sublunaires, qui sont corporelles (comme l'étaient les réalités

supralunaires: planètes, étoiles, etc.), mais aussi temporelles et

non éternelles: le Livre III du traité des _Opinions des

Philosophes _ ressemble ainsi à un un traité des _Météores._ Avec

le Livre IV, on passe à l'examen des réalités terrestres, en

commençant par les réalités psychiques, de l'Ame en général (IV,

chap. II) aux facultés de l'âme (jusqu'au chap. XXI), en passant

par les différentes formes d'âme, son immortalité, etc. Vers la

fin du quatrième Livre (chap. XXII & XIII), on trouve des

considérations sur les liens de l'âme et du corps; au début du

livre V, sur les images des la divination et des songes (Chap. I

& II). Le Livre V a pour objet les réalités terrestres

inférieures à l'âme: de la semence générative (V, chap. III), qui

en est issue, à la santé du corps (V, chap.XXX) en passant, par la

description des processus de génération, de développement de

l'embryon. Ce qui peut sembler à un lecteur non averti des XVIè

et XVIIè siècle un cours complet de philosophie naturelle, est en

réalité un catalogue d'opinions des auteurs anciens, portant sur

tous les sujets auxquels les philosophes de toutes les écoles

avaient coutume de s'intéresser.
 
 

Le présent travail de copie obéit aux principes suivants:
 
 

1&deg; Le texte _Des Opinions des Philosophes,_ du Pseudo-Plutarque a

été copié dans l'édition des _æuvres Mêles _ de Plutarque,

traduites par Jacques Amyot à la Renaissance. Cf. Copie de la

page de garde du tome second en _incipit._
 
 

2&deg; J'ai renoncé à suivre systématiquement l'orthographe et la

graphie de l'époque, que j'ai donc modernisée, partout où j'ai

estimé qu'elle faisait entrave à la lecture.
 
 

3&deg; La pagination originale a été systématiquement conservée entre

crochets.
 
 

4&deg; Les anotations et divisions ajoutées en marges par J. Amyot sont

également conservées. Les intertitres numérotés en chiffres

romains ajoutés en marge ont ainsi été replacés en tête des

paragraphes concernés (dans un caractère plus petit). Il convient

de leur porter attention, au moins en ce sens: si, dans leur

teneur générale, ces gloses ne sont que des extraits du texte du

Pseudo- Plutarque, elles comportent parfois des remarques

critiques ou réfutatives - en particulier pour ce qui regarde la

dimension de la religion et de la théologie - qui témoignage de

l'état d'esprit dans lequel on lisait pareil texte à cette époque.
 
 

5&deg; La ponctuation a été conservée telle quelle.
 
 

6&deg; Les mots d'ancien français dont l'usage s'est perdu depuis

l'époque de J. Amyot sont traduit en notes (ce sont les

définitions du _Dictionnaire de l'Académie Française, _ dans

l'édition de 1740, du _Dictionnaire d'Ancien Français _de

Gransaignes d'Hauterive, ou du _Dictionnaire de l'Ancien Français

jusqu'au milieu du XIVè siècle _de Greimas qui sont fournies).
 
 
 
 

Eric DUBREUCQ

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